Depuis le début de la guerre russo-ukrainienne en février 2022, les dynamiques énergétiques mondiales ont été profondément modifiées. L’Europe a réduit sa dépendance au gaz russe, passant de 1 500 térawattheures par an avant le conflit à moins de 250 térawattheures actuellement. Cela soulève la question : d’où provient désormais le gaz que nous utilisons ?
La disparition du gaz russe, est-ce une réalité ?
Selon un rapport récent de l’IEEFA (Institute for Energy Economics and Financial Analysis), la consommation de gaz en Europe a chuté en 2023 pour atteindre son niveau le plus bas en dix ans, s’établissant désormais à 452 milliards de mètres cubes, soit en dessous de la consommation de 2014 (472 milliards de mètres cubes). Après l’invasion de l’Ukraine par la Russie, la demande de gaz a diminué de 20 % sur tout le continent au cours des deux années suivantes. Cette baisse de la demande doit néanmoins être comblée. Comment s’adapte-t-on en cette « nouvelle ère énergétique » post-conflit ?
En réalité, l’Europe demeure toujours un importateur de gaz naturel liquéfié (GNL) russe, se classant juste derrière les États-Unis et le Qatar. En 2023, le GNL américain dominait les importations et représentait environ 47 % du volume livré en Europe. La Russie représentait 11,9 % et le Qatar 12,3 %. Les principaux pays européens importateurs de GNL étaient la France, avec 17 % des importations en 2023, suivie par l’Espagne (15 %) et les Pays-Bas (13 %).
Cependant, avec la diminution des importations européennes par gazoduc, la part de la Russie dans l’approvisionnement total en gaz de l’Europe est passée de 45 % en 2021 à 15 % en 2023. Le gaz russe a largement été remplacé par le célèbre GNL américain. Les dynamiques pourraient toutefois évoluer dans les années à venir, notamment en tenant compte des récentes déclarations en provenance du Qatar.
Le Qatar, une nouvelle source d’approvisionnement pour l’Europe ?
Deux ans après le début du conflit russo-ukrainien, le Qatar a dévoilé le dimanche 25 février 2024 de nouveaux projets pour accroître la production du plus grand gisement de gaz naturel au monde. Cette extension du champ offshore North Field, nommée « North Field West », permettrait d’ajouter environ 16 millions de tonnes supplémentaires de gaz naturel liquéfié (GNL) par an aux projets de développement existants. Le ministre qatari de l’Energie, Saad al-Kaabi, a indiqué lors d’une conférence de presse que cette évolution porterait la capacité à 142 millions de tonnes par an d’ici 2030.
« North Field renferme d’importantes réserves de gaz supplémentaires estimées à 240 billions de pieds cubes, augmentant ainsi les réserves de gaz de l’État du Qatar de 1 760 à plus de 2 000 billions de pieds cubes », a souligné M. Kaabi, qui est également le PDG de QatarEnergy, le géant public qatari des hydrocarbures. Cette augmentation représente près de 85 % par rapport aux niveaux de production actuels. Le PDG de QatarEnergy a annoncé que la société entamera immédiatement les travaux d’ingénierie pour garantir l’achèvement de l’expansion dans les délais. Le Qatar figure parmi les principaux producteurs mondiaux de GNL aux côtés des États-Unis, de l’Australie et de la Russie.
Jusqu’à présent, la Chine, le Japon et la Corée du Sud ont été les principaux marchés pour le gaz en provenance du Qatar, mais la demande européenne a connu une forte augmentation. L’Europe va-t-elle privilégier l’émirat du Qatar aux États-Unis ? À suivre.